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Une exposition retraçant la période de l’Occupation à la Libération

Publié : 2 février 2025 à 6h00 - Modifié : 3 février 2025 à 10h29 Mandy Vereecken

À travers 46 panneaux, documents, photographies et témoignages illustrent les événements marquants vécus par Rouffach et ses habitants durant la Seconde Guerre mondiale, notamment le rôle clé joué par le centre hospitalier.


Dès septembre 1939, l’évacuation de 1 512 patients vers d’autres établissements du centre et du sud-ouest de la France a profondément bouleversé l’organisation de l’hôpital, comme le rappellent Bernard Guiot et Paul Haenn du groupe « Histoire et Recherche ».


Rapidement, l’établissement est investi par une école destinée aux Volksdeutsche, visant à « germaniser » 450 jeunes Sud-Tyroliens. En 1941, il accueille également une Napola (Nationalpolitische Lehranstalt), école élitiste formant la future génération du Reich. « Peu d’Alsaciens y étaient inscrits, mais certains jeunes tentaient d’imposer la Hitlerjugend dans les villages environnants », souligne Bernard Guiot.


La politique de germanisation s’est accompagnée de l’expulsion de familles jugées « indésirables ». Paul Haenn, alors âgé de 8 ans, se souvient du 10 décembre 1940, lorsque sa famille a été contrainte de quitter Rouffach en raison des origines tchécoslovaques de sa mère. « La Feldgendarmerie est venue me chercher à l’école. Ma mère était en larmes. Nous avions deux heures pour faire nos bagages. » La famille a été envoyée à Clairvivre, en Dordogne, une cité sanitaire initialement construite pour les victimes des gaz de la Première Guerre mondiale. Comme eux, une douzaine de familles rouffachoises ont été déplacées et n’ont pu assister à la Libération. Paul Haenn n’est rentré à Rouffach que le 28 mai 1945, à l’âge de 13 ans.


Après la Libération, l’hôpital psychiatrique est transformé en École des Cadres pour la 1re Armée afin de professionnaliser les troupes. « Tout a été mis en place en huit jours, au grand dam du directeur de l’hôpital, le Dr Adam, qui a tenté de s’opposer à cette installation. Il est même allé voir le préfet pour demander l’internement du général De Lattre en tant que malade mental ! » raconte Bernard Guiot avec une pointe d’ironie. L’école sera finalement transférée à Strasbourg en novembre 1946.


L’exposition met aussi en lumière les trajectoires d’une quarantaine de Rouffachois pendant la guerre : incorporés de force, résistants, réfractaires... Parmi eux, Xavier Goetz, garde champêtre interné à Schirmeck, et l’ancien maire Joseph Freyeisen, qui rejoindra par la suite les SAS britanniques.


Des objets historiques seront également présentés, comme des pièces du char 54, détruit devant les Récollets le 4 février 1945, ainsi que la croix du spahi Sansoni, initialement enterré à Rouffach avant d’être transféré à la nécropole de Sigolsheim. « Ces reliques, conservées au musée des Combats de la Poche de Colmar, ont été précieusement collectées par l’ancien archiviste de la ville, Pierre-Paul Faust », rappelle Robert Klinger, ancien président de l’UNC.


L’exposition bénéficie d’un accompagnement unique : les visiteurs seront guidés par trois témoins de l’époque. « C’est une manière précieuse de transmettre la mémoire, notamment auprès des jeunes. Le dialogue direct avec ceux qui ont vécu ces événements suscite leur curiosité et leur compréhension », souligne Jean-Philippe Kammerer, adjoint à la culture.


Cette exposition promet ainsi de faire revivre une page essentielle de l’histoire locale, tout en honorant ceux qui l’ont traversée.